samedi 9 novembre 2013

Poupée de maïs, III

Petit pastiche:

Nous n'irons plus aux champs les maïs sont coupés,
La belle que voilà ira les ramasser.


C'est vrai, les maïs sont coupés, et les enveloppes des panouilles sont tombées dans la boue, triturées par les machines.
Mais, qu'importe, on en trouve encore de presque propres.

Et, la belle de la chanson, ce sera la poupée?

Les préparatifs:

Et d'une:

Et de deux:

mardi 5 novembre 2013

Le couteau, d’une violence à l’autre...

Le couteau, d’une violence  à l’autre...

Anodin, le couteau de poche ?
Sûrement pas : il n’y a qu ‘à voir ce qui se passe aujourd’hui dans les sas de contrôles des aéroports, et dans les écoles !
Et pourtant, il fut un temps ou chaque enfant —garçon, bien sûr !— avait son couteau dans sa poche ; l’un n’aurait pas pu vivre sans l’autre. Et jamais, même dans les pires bagarres, personne n’aurait sorti son couteau contre son adversaire. Ce n’est peut-être pas par hasard, car ça avait, loin dans l'inconscient culturel, un caractère sacré...
Mais, les choses ont bien évolué !

Revenons encore une fois aux sources, latines, pour l’occasion : « couteau » vient de « cultellus », de « culter », et enfin du verbe « colo ».
Et c’est le verbe « colo » qui nous intéresse, par son champ sémantique initial, et par sa nombreuse descendance, polysémique et protéiforme, comme tous les termes racines.
Il signifie en effet, à la fois et tour à tour : cultiver, habiter, séjourner, soigner, entretenir, orner, parer, s'occuper de, pratiquer, exercer, protéger, veiller sur, s'intéresser à, honorer, vénérer, adorer, respecter, avoir des égards pour, montrer de la déférence, courtiser, puis, associé à d’autres termes : cultiver (ses champs), pratiquer (la vertu), exercer (un métier), respecter (la paix), accomplir (les sacrifices domestiques).
Lorsqu’on lui donne son nom complet, à la mode latine, on a : colo, colĕre, colŭi, cultum, qui sont différentes formes initiales de sa conjugaison. Et c’est la dernière qui nous intéresse : « cultum ».
Compte tenu de l’ensemble des significations de ce verbe, on comprend très facilement la descendance de "cultum » en ‘culture » des champs ou de l’esprit, en « culte » à une divinité, et même en « colonie » ou « colonisation ».
Mais, que dire de « culter » qui signifie couteau ?
« CULTER  est le nom donné par les anciens à différents instruments employés pour couper, qui étaient faits d'un seul tranchant, le dos un peu large, et la pointe aiguë ; tous servaient pour les besoins du ménage et de l'agriculture, mais non de la guerre, excepté quand on parle des temps barbares et d'un assassin plutôt que d'un soldat. Notre mot couteau est peut-être la traduction la plus exacte, mais le culter ancien ne désigne en général dans les instruments que nous appelons couteaux que ceux de la plus grande espèce », dit un dictionnaire français.
Faisons un pas de plus dans le dictionnaire. Nous découvrons ceci, à « culter » : « Couperet employé par le cultrarius dans un sacrifice pour couper la gorge de la victime (Plaut. Rud. I, 2, 45), et par les bouchers à l'abattoir (Varro, R.R. II, 5, 11) ; il était fréquemment représenté sur les bas-reliefs des sépulcres”.
Et, un peu plus loin : « cultrārĭus signifie victimaire (celui qui égorge la victime)”.
          “Le CULTRARIUS était un assistant d'un prêtre qui officie ; il immolait la victime dans un sacrifice, en lui coupant la gorge avec un couteau, culter, par opposition au popa qui l'abattait d'un coup de hache, securis, ou de maillet, malleus (Suet. Cal. 32 ; Inscript. ap. Grut. 640, 11). La gravure ci-jointe, prise d'un très beau bas-relief en marbre découvert à Pompéi, représente une vieille femme et un faune occupés à offrir un porc en sacrifice : la première fait office d'une prêtresse, et le second du cultrarius qui coupe la gorge de la victime. »

Autrement dit, le « culter » était un instrument du « culte », destiné à verser le sang de la victime, car à Rome, on regardait l'effusion du sang comme très agréable aux divinités.
La victime était préalablement recouverte d’une pâte faite de farine de froment et de sel, appelée en latin mola, d’où « immoler » (enduire de mola).
Puis, le prêtre goûtait le vin, en donnait à goûter à ceux qui étaient présents, et le versait entre les cornes de la victime. Cette cérémonie constituait les libations.
Ensuite le cultrarius égorgeait la victime et aussitôt on recevait le sang dans des coupes.
Enfin, le sacrifice terminé, les sacrificateurs se purifiaient les mains, et congédiaient l'assistance par la formule Licet ou Ex templo, c'est-à-dire : « On peut se retirer ».
Le pain, le vin, le sacrifice, ça ne vous rappelle rien ?

Le couteau, instrument central du sacrifice, oui, mais pour quelle raison, pour quoi faire ?
La langue espagnole a peut-être la réponse.
En espagnol, couteau se dit « cuchillo » (même origine), mais aussi « navaja », mot qui amuse les touristes qui ne savent ni le prononcer ni l’utiliser à bon escient... Parce que ça fait « couleur locale », n’est-ce pas ?
« Navaja » vient du latin « novacula », qui signifie couteau, on s’en serait douté !
Et « novacula » ? Eh bien, son origine est dans le verbe « novo », qui signifie rénover, renouveler et même, en politique, « novare res » signifie « changer l’ordre des choses », « faire une révolution ».

Tout est dit !
Le couteau permet de renouveler les choses, par le sacrifice rituel.
Le couteau, principal instrument « sacré » du culte, et fondateur de la culture !

Voyez comme les choses ont bien changé !